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Le parc Bharathi à Pondichéry, Inde

  • Mathieu BOUDET
  • 12 mai 2017
  • 5 min de lecture

Pondichéry est un ancien comptoir français en Inde, le seul concédé à la Compagnie des Indes de France par Sher Khan Lodi en 1673, dans le but de fragiliser le monopole Hollandais. Ceux-ci ont alors nettement influencé le développement urbanistique de Pondichéry grâce à une organisation en damier, alignés à la côte.

Le comptoir est saisi par les anglais en 1761 et est entièrement rasé par le gouverneur Pigott. Il ne sera récupéré par les français qu’en 1765, peu de temps après la signature du traité de Paris (1763). Jusque 1816, la ville passe de main en main en en subissant les conséquences désastreuses de la guerre. La ville apparait comme une enclave française dans un pays entièrement dominé par les britanniques. En 1848, tous les habitants du comptoir acquièrent la nationalité française à la faveur de l’abolition de l’esclavage.

Devenu territoire d’outre-mer en 1946, alors que l’Inde se prépare à l’indépendance, le comptoir est place d’un jeu politique largement influencé par la guerre d’Indochine. Ce dernier durera jusqu’au 28 Mai 1956 où, suite à la consultation des conseillers municipaux, Pondichéry est rattaché à l’Inde.


L’histoire de Pondichéry, ses différentes cessions et identités, ont directement influencé l’urbanisme de la ville et son développement architectural et paysager. Situé entre le quartier français (ou White Town) et le quartier Tamoul, le parc Bharathi est à l’image de ces deux cultures.



Une trame géométrique

Inscrit dans le damier hollandais de la vielle ville, le jardin s’organise via deux perspectives orthogonales :

  • La première, orientée du Sud au Nord, débouche sur le palais Raj Nivas, résidence du gouverneur de la ville.

  • La seconde, orientée Ouest-Est, débouche sur la statue de Gandhi, positionnée sur le front de mer. En plus de traverser le parc, elle passe par une place constituée de la statue de Jawaharlal Nehru (faisant face à celle de Gandhi) et une estrade maçonnée, pouvant ainsi accueillir les manifestations.

Au croisement de ces deux perspectives, matérialisées par deux larges allées, au centre du parc, se trouve le Aayi Mandapam. Un monument blanc, bâti sous Napoléon III pour commémorer la mise en place de l’eau potable, tout en rappelant l’histoire d’Aayi, une courtisane qui détruisit sa propre maison pour ériger un réservoir et ainsi apporter l’eau à sa cité. Le style architectural est de l’empire, constitué de colonnades et de frontons triangulaires.


De ce centre, quatre autres cheminements mineurs rejoignent les coins du parc et le cheminement du pourtour. Ils sont traités en dalle béton, tandis que les cheminements principaux incluent des pavés dans leurs trames. L’ensemble est ainsi séparé en 8 parties, plus ou moins de même taille.

Enfin, chaque angle est coupé et isolé du reste par une voirie. De fait, le parc en lui-même semble être, en vue aérienne, comme une photo insérée dans un album par les quatre coins.



Enfin, chaque entrée (4 au total) est légèrement incluse dans un renfoncement, de sorte qu’elles sont finalement constituantes du jardin. Le tout est clôturé par une serrurerie en fer forgé montée sur un muret bas.


Des espaces peu organisés


Les huit espaces créés par les allées sont chacun traités, par paire, comme des espaces distincts, sans liens entre eux. C’est à ce niveau que l’on se rend compte du mélange de culture présent à Pondichéry : tandis que la trame rectangulaire fait penser à l’urbanisme hollandais, le travail des perspectives aux jardins à la française, la séparation des usages fait une référence implicite aux quartiers tamouls et à la séparation flagrante des corps de métier (restauration, logements, temples, types de commerces, etc.). Ainsi, sur ces huit espaces, deux sont dédiés aux jeux grâce à deux aires constituées de mobilier somme toute assez classique (toboggan, cages d’écureuil, balançoires simples et doubles), deux se veulent l’espaces de collections végétales, deux présentent des sculptures et enfin, les deux derniers sont des étendues engazonnées dédiées à la détente et au repos.

Enfin, la végétation utilisée et sa conduite dénote avec la symétrie souhaitée : Les arbres d’alignement sont en forme libre tandis que de nombreux arbres semblent plus anciens que le parc lui-même. Seuls quelques haies de buis subsistent dans un des secteurs, tentative plus ou moins réussie de taille à la française.


Un mobilier très présent


Le mobilier utilisé est également très révélateur de ce patchwork de culture.

Nous retrouvons tout d’abord une maçonnerie basse et colorée, semblable à celle rencontrée dans le parc Ratna au Népal. Elle est complétée par une gamme simple de bancs bétons, liés au muret, tandis que d’autres assises sont alignées sur les perspectives principales.

La maçonnerie est également constituante des aires de jeux. En effet, en plus d’un mobilier en acier classique (balançoire à bascules, cabanes et toboggan), le béton est également utilisé. On remarquera notamment un toboggan à double pente et unique accès dont l’aspect rappelle les antiques outils astronomiques usités par l’Inde, et visibles à Jaipur notamment.

Chaque entrée principale est encadrée de deux pergolas marquant les accès des cheminements secondaires. Constituées de poteaux béton et d’une structure en bois, elles ne supportent pourtant aucune grimpante.

Enfin, de nombreuses statues et sculptures ont été installées dans le parc et aux alentours directs. Nous avions déjà évoqué la statue de Gandhi, placée dans la perspective Ouest, sur le front de mer, ainsi que la statue de Nehru située à mi-chemin. Tout autour du parc, et plus particulièrement dans les triangles formés à chaque coin, de récentes statues de dirigeants sont installées. Nombreuses, elles conservent un style indien et sont toutes agrémentées d’un escalier et d’une ombrelle permettant d’y ajouter fleurs, offrandes et autres bénédictions. Les statues sont recouvertes de couleurs parfois criardes, telles que le jaune, le vert ou encore le violet. A l’inverse, au sein du parc, les sculptures sont plus massives et brutes. Plus abstraites, elles sont taillées dans d’uniques blocs de béton blanc et disposées sur les étendues engazonnées.



Des usages variés pour un parc central


Le parc est très fréquenté par la population de Pondichéry et ses touristes. Grâce à ses nombreux arbres, il constitue un espace ombragé permettant de s’abriter du soleil et des fortes chaleurs de la journée. Ainsi, vers le milieu de la journée, les familles indiennes l’investissent pour déjeuner dans les allées et les étendues engazonnées, à l’ombre des flamboyants et autres mimosas. Puis la sieste se poursuit pendant que les enfants et les jeunes se regroupent sur les aires de jeux, en enchainant les selfies et poses devant les statues.

Le parc constitue également une étape sur la promenade balnéaire. Sa centralité dans le quartier historique de Pondichéry en fait un parfait lieu de regroupement. Toutefois, les meetings associatifs et politiques sont clairement interdits. Ceux-ci devront se dérouler sur la place attenante où une estrade maçonnée a été érigée.

Enfin, les rues voisines étant garnies de gargotes et de stands de nourriture et boissons, le personnel du palais et de l’hôpital y prennent aisément leurs pauses.





Le parc Bharathi est un bon exemple de l’évolution et de la réappropriation culturelle d’un espace. Initialement conçu dans un schéma urbanistique hollandais, puis dessiné selon des perspectives très françaises, il est finalement empli de références à la culture tamoule et indienne. Il porte ainsi, à lui seul, l’ensemble des marques du passé historique de Pondichéry.

 
 
 

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